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Le gouvernement de Bruxelles proclame que la menace ousama est désormais anéantie, que le conflit a renversé le gouvernement religieux et fédérateur de l’ancienne grande nation islamique, que le démon de la division a de nouveau morcelé les populations locales en tribus,
en clans, mais nous n’avons plus
aucun instrument de surveillance pour anticiper les éventuels regroupements de l’autre côté de l’ancien Front Est, nous n’avons plus les moyens d’expédier des satellites espions dans l’espace, plus aucun de nos journalistes, dont votre serviteur, n’ose s’aventurer dans une région du globe où la mort guette dans chaque ruine, derrière chaque rocher, bref, nous ne savons pratiquement plus rien des pays du Moyen-Orient. Je demande, avec solennité, à nos dirigeants de prendre leurs responsabilités, de mettre en place sans attendre un système de surveillance ou de prévention identique à la grande Muraille (une gigantesque clôture électrifiée) érigée par les Israéliens le long de leurs frontières orientales.
Si gouverner c’est prévoir, alors, messieurs,
efforcez-vous de voir plus loin que le bout de votre nez.
Jules-Jean Jacquin
La Nouvelle Europe Libre
Les bombardements ousamas n’avaient laissé des anciennes raffineries de pétrole que leurs structures métalliques rongées par le sel, le vent et les fientes des mouettes. Le port de Burgas, autrefois important selon Hristo, n’était qu’une succession de quais et de hangars plus ou moins défoncés qui abritaient de vieux bateaux de pêche et d’énormes tankers venus de Russie. La rouille régnait en maîtresse et maculait par endroits les épais bourrelets de neige accumulés le long des entrepôts. Si le port, l’ancienne porte de la Côte du Soleil, avait plus ou moins été relevé de ses cendres, la ville ressemblait à un terrain vague hérissé de congères, d’arbustes, d’habitations de fortune et de panaches de fumée chahutés par les rafales. La mer Noire portait bien son nom : elle réfléchissait toute la noirceur du ciel et s’étalait comme une immense tache d’encre entre les marges immaculées de ses côtes.
Hristo dirigea son camion parmi les véhicules et les wagonnets répartis sur les quais. Des dockers s’affairaient à décharger des remorques alignées devant les flancs ouverts des bateaux comme des animaux devant leurs mangeoires.
Luc désigna les hommes d’équipage d’un porte-conteneurs dont les bonnets étaient enfoncés jusqu’aux yeux.
« Ceux-là ressemblent plus à des Turcs qu’à des Bulgares.
— Commerce pas seulement avec Russie, expliqua Hristo. Sinon nous pas assez pour vivre.
— Je croyais que le commerce avec les ousamas était interdit.
— Plein de choses interdites en Europe… »
Le Bulgare arrêta le camion à l’entrée d’une jetée étroite faite de gros blocs de béton et bordée de chalutiers et de caboteurs.
« Bateau attendre là. »
Jemma et Luc suivirent Hristo sur la jetée balayée par une humidité glaciale et pénétrante. Des odeurs de poisson se mêlaient aux effluves de sel et de fioul. Jemma n’était pas fâchée d’en avoir fini avec cet interminable voyage, pas fichée de sortir de la vie de Hristo. Le trajet s’était pourtant déroulé sans encombre entre Sofia et Burgas, mais le Bulgare, sa moustache, ses airs sournois et son camion lui sortaient par les yeux, le souvenir de son haleine sur sa nuque, de ses mains sur ses seins, de la pression de son ventre sur son dos et ses fesses, la hantait, la révulsait. Elle avait envie de nouveaux horizons, de nouvelles atmosphères. De nouvelles vies. Elle n’avait pas fermé l’œil de la nuit, ni quand elle s’était allongée aux côtés de Luc dans la couchette, ni quand elle s’était recroquevillée sur la banquette, inquiète, tourmentée, comme harcelée par une présence invisible. Elle avait pensé à Manon, au fantôme de Manon, et elle avait pleuré toutes les larmes de son corps, inconsolable soudain. Elle avait failli réveiller Luc, lui demander comment il pouvait pioncer pendant qu’une femme perdait toute sa peine à ses côtés, comment on pouvait se montrer aussi égoïste, puis elle s’était raisonnée, elle avait admis qu’il n’était pour rien dans son malheur, qu’elle resterait à jamais seule avec sa souffrance comme tout homme et toute femme sur cette terre.
Hristo s’engagea sur la passerelle d’un petit bateau de pêche à la peinture écaillée et à l’aspect peu engageant. Il n’y avait que deux hommes à bord, un vieillard au visage couturé de rides, un adolescent aux cheveux ondulés, aux yeux noirs bordés d’immenses cils recourbés. Mains et têtes nues, ils portaient des cuissardes et des cirés par-dessus leurs vestes de laine. Hristo et l’ancien conversèrent quelques instants à voix basse, puis le chauffeur tira une enveloppe de la poche intérieure de son blouson et la tendit à son vis-à-vis. Le vieil homme la décacheta et recompta soigneusement les billets avant de les glisser dans l’échancrure de son ciré.
« Partir tout de suite. Nous arriver en retard. Eux attendre depuis deux jours. Mon flingue, maintenant. »
Luc rendit l’arme à Hristo sans barguigner. Le chauffeur s’en saisit avec vivacité et joua un petit moment avec le cran de sûreté. Jemma cessa de respirer jusqu’à ce qu’il eût fait disparaître le pistolet dans son blouson.
« Bonne chance. »
Ce furent les seules paroles d’adieu de Hristo. Il retourna sur ses pas en prenant soin de ne pas croiser le regard de Jemma. Son camion disparut derrière un grand tanker amarré au quai suivant.
« Bon débarras, murmura Jemma.
— Il nous a conduits à bon port, vous devriez lui en être reconnaissante.
— Reconnaissante ? » L’indignation tirait la voix de Jemma dans les aigus. « Ce… ce porc a voulu me violer !
— Allons-y. Ils attendent. »
Luc sauta sur le pont du bateau. Un vent violent se leva, des trombes de neige s’abattirent tout à coup sur le port, rendant la visibilité quasi nulle. L’adolescent aida Jemma à embarquer, puis entraîna les deux passagers vers la cabine étroite qui servait à la fois de poste de pilotage et de refuge, le seul abri visible sur le pont jonché de filets et de caisses. Équipé d’un treuil et d’un système de câbles en piètre état, le bateau ballotté par les vagues heurta sèchement les blocs de béton de la jetée. Le vieil homme n’attendit pas que la tempête s’apaise pour lancer le moteur. Il hurla quelques mots à l’adresse de l’adolescent qui alla aussitôt larguer les amarres et revint quelques secondes plus tard dans la cabine les cheveux et les épaules saupoudrés de flocons.
« Vous pensez vraiment que ce rafiot a la capacité de traverser la mer Noire ? »
Jemma avait été obligée de crier pour dominer le ronronnement crachotant du moteur. L’humidité se glissait sous ses vêtements et la pinçait jusqu’aux os.
« Ce n’est pas un caboteur en tout cas, répondit Luc. On verra bien.
— On ne verra rien du tout ! On sera morts de froid avant d’arriver sur l’autre rive !
— Il y a deux cent cinquante bornes jusqu’à Zonguldak en Turquie. L’affaire d’un jour et demi. Peut-être un peu plus si les vents ou les courants sont contraires. On est protégés de toute façon… »
Luc désigna la statuette d’une Vierge dorée fixée sur une étagère au-dessus de la large baie vitrée.
Les yeux de l’adolescent, oiseaux farouches et curieux, volaient sans cesse de l’un à l’autre. Âgé de seize à dix-sept ans, il avait un visage déjà tanné par l’air du large et le sourire facile, charmeur, légèrement frondeur. Le vieux les rejoignit dans la cabine, s’installa devant le poste de commandes et entreprit de sortir du port alors que, par la baie criblée de flocons, on distinguait à peine la proue légèrement surélevée. Il effectua les manœuvres sans encombre, il n’avait pas besoin de voir pour diriger son embarcation dans l’étroit chenal qui donnait sur le large. Ils croisèrent un chalutier imposant qui, rentrant au port, les salua d’un long et puissant coup de sirène. La neige estompait déjà le pont, les filets et les caisses.
« Je vais poser une question idiote, cria Jemma. Ça ne glace, jamais, une mer ?
— Si la période glaciaire se prolongeait, une mer fermée comme la mer Noire pourrait être entièrement prise dans les glaces. Mais je ne pense pas que ça se produira. »
Le vieux se retourna et, tout en maintenant le cap, enveloppa les deux passagers d’un regard pénétrant, comme s’il venait seulement de prendre conscience de leur présence. Impossible de discerner quoi que ce soit dans ses yeux à l’indéfinissable couleur. Ils paraissaient éteints au milieu de son visage parcheminé – à force, peut-être, de contempler le soleil.
« Moi, en tout cas, je serai bientôt prise dans les glaces…
— On peut sans doute arranger ça. »
Par gestes, Flamand demanda aux deux Bulgares s’ils pouvaient leur fournir des couvertures. L’adolescent acquiesça d’un large sourire, ouvrit, sur une cloison de bois, un compartiment d’où il tira de vieilles couvertures matelassées. Jemma accepta celle qu’il lui tendit malgré les traces d’huile ou de graisse qui la maculaient. Elle s’en couvrit les épaules et la referma devant elle en s’efforçant d’oublier son aspect crasseux et son odeur fétide.
Le vent du large prit le bateau de travers au sortir du chenal et l’entraîna dans une violente gîte.
Bercée par le ronronnement du moteur et le léger roulis, Jemma ne pouvait se défaire de l’impression que Manon se serrait entre eux dans la minuscule cabine, une sensation physique, oppressante. Lorsqu’elle rouvrait les yeux, elle s’attendait à découvrir tout près d’elle le visage boudeur et la chevelure rebelle de sa fille. Mais, dans la nuit illuminée par une lune pleine et brillante, elle ne distinguait que les silhouettes de Ditmar, le vieil homme, de Valentin, son apprenti, et de Luc, allongé à ses côtés. La tempête de neige s’était interrompue environ une heure après leur départ et les nuages pourchassés par le vent avaient déserté un ciel fourmillant d’étoiles. Ils avaient dîné d’une soupe chaude et d’un morceau de pain au goût prononcé de sel avant de s’installer pour une nuit inconfortable sur le plancher de la cabine. Valentin et Ditmar se relayaient à la barre et se reposaient à tour de rôle, assis ou accroupis contre la cloison. Ils ne parlaient pas un mot de français ni aucune autre langue que le bulgare – hormis quelques mots d’anglais –, mais ils avaient réussi à échanger, avec leurs passagers, des bribes de conversation à grand renfort de gestes, de bruits et de mimiques. Luc et Jemma avaient cru comprendre qu’ils n’étaient pas vraiment pêcheurs, même s’ils jetaient de temps à autre les filets afin de prendre quelques poissons et de tromper la vigilance des gardes-côtes. Leur principale activité était d’acheminer du cannabis ou de l’opium entre les terres ousamas et l’Europe de l’Est. Valentin leur avait montré, avec une fierté juvénile et touchante, son pistolet, une antique pétoire dont on se demandait dans quel sens allait partir la balle. Parfois, ils transportaient des voyageurs clandestins en Turquie ou en Géorgie, ou bien ils faisaient passer en Europe des ousamas indésirables dans leurs pays.
Manon était vivante. Jamais Jemma n’avait ressenti avec une telle intensité sa présence. On pouvait tricher avec les sentiments, avec les émotions, pas avec la chair ni le sang d’une mère. Elle avait maintenant hâte de mettre le pied sur le sol musulman, hâte d’explorer ces contrées mythiques qui avaient pour nom Turquie, Syrie, Liban, et qu’une guerre dévastatrice avait coupées du reste du monde. D’elles on ne savait rien, sinon qu’elles avaient été partiellement ou totalement détruites, qu’elles n’étaient plus administrées par un gouvernement religieux et centralisé, qu’elles étaient livrées aux tribus, aux clans, aux hordes, aux trafics, au pillage, à l’esclavage, qu’il n’y régnait plus que la loi des armes. C’était là, dans ce chaos, sur ces terres de tous les dangers, que Jemma retrouverait sa fille, elle en était désormais convaincue. L’armée des enfants n’était peut-être pas une légende.
Incapable de rester en place, elle se leva, sortit de la cabine et se rendit dans un recoin du pont, isolé par une cloison et percé d’un trou qui, selon Ditmar, faisait office de toilettes. La nuit était paisible, le vent quasi nul, la lumière vif-argent de la lune et des étoiles se désagrégeait sur les crêtes dansantes des vagues. Jemma se défit de sa couverture, baissa son fuseau et s’accroupit au-dessus du trou. Elle s’était retenue pendant des heures, échaudée par sa mésaventure avec Hristo – Valentin et Ditmar étaient armés eux aussi. Cependant, l’adolescent semblait s’intéresser davantage à Luc qu’à elle. Les fesses cinglées par le froid vif, elle se releva après avoir vidé sa vessie et commença à se rhabiller.
Entrevit une silhouette quelques pas plus loin.
Se tendit jusqu’à ce qu’elle reconnaisse Luc.
« Vous m’avez fait peur, bredouilla-t-elle en achevant de reboutonner sa parka.
— Désolé. J’ai cru que vous aviez eu un malaise. Vous êtes sortie de la cabine avec une telle précipitation.
— Envie de faire pipi. Vous savez comment sont les femmes. »
Luc s’agrippa au bastingage et contempla la mer. Ses cheveux soulevés par le vent se dressaient comme les serpents d’une gorgone par-dessus le col relevé de son manteau de cuir. Jemma le rejoignit après avoir enfilé ses gants et passé la couverture autour de ses épaules.
« Les choses se passent plutôt pas mal pour nous, dit-il. Les conditions sont idéales pour une petite croisière sur la mer Noire, vous ne trouvez pas ? »
Jemma hésita quelques instants avant de se lancer.
« Je… je ne vous connais toujours pas, Luc Flamand. Parfois je vous prends pour un parfait salaud, parfois je ne sais plus quoi penser de vous. »
Il se renversa pour lâcher un petit rire aigu.
« Est-ce que vous savez déjà qui vous êtes ? »
Elle connaissait quelques aspects d’elle, ses réactions épidermiques ou sensorielles, ses désirs convenus ou inavouables, ses colères et ses lâchetés, quelques-unes de ses forces et presque toutes ses faiblesses, mais elle n’avait pas exploré ses terres intimes, elle n’avait jamais cherché à savoir de quelle source jaillissaient ses pensées, ses émotions, ses sentiments.
« Pas vraiment, je l’avoue, voire pas du tout. Mais j’ai l’impression que, de votre côté, vous vous ingéniez à entretenir le mystère. Vous n’êtes pas entré dans ma vie par hasard, n’est-ce pas ?
— Il faudrait pour ça que le hasard existe. » Il lâcha le bastingage et écarta les bras. « Que le hasard ait présidé à la naissance de ce monde. Que ce monde ne soit que le produit d’une explosion accidentelle.
— Je croyais que le créationnisme était réservé à des fanatiques obscurantistes comme les évangéliques.
— Il y a une multitude de voies entre le créationnisme et le hasard. C’est peut-être à l’une d’elles que nous conduit la disparition des enfants. »
Jemma rejeta d’abord avec force les paroles de Luc, comme si elles insultaient son intelligence, puis elle prit conscience qu’elles rencontraient un écho dans les profondeurs de son être.
« C’est la raison pour laquelle, je pense, les mouvements chrétiens s’intéressent de très près au phénomène, reprit Luc. Non qu’ils s’inquiètent des gosses disparus, mais ils redoutent, justement, l’ouverture d’une nouvelle voie. Une voie qui rendrait inutiles les religions, leurs dogmes et leurs hiérarchies. Une voie où ils cesseraient d’être légitimes. Une voie qui abolirait les peurs et les jugements. Une voie qui révélerait la vraie nature de l’homme, sa vraie relation avec l’univers.
— Et c’est quoi, la vraie nature de l’homme ? »
Luc haussa les épaules.
« Je n’en ai qu’une vague idée. Une intuition, si vous préférez. Je la cherche, comme vous.
— Oh, moi, je cherche seulement ma fille.
— Vous savez très bien que ce n’est pas vrai. Votre fille n’est qu’un prétexte. Vous m’avez suivi pour d’autres raisons.
— Qu’est-ce qui vous autorise à proférer ce genre de conneries ? » Jemma l’aurait volontiers giflé si elle n’avait pas été engoncée dans sa couverture et ses vêtements. « Vous n’êtes pas dans ma peau. Qu’est-ce que vous connaissez à l’amour maternel ?
— Vous m’avez suivi parce que votre relation à vous-même ne vous satisfait pas, continua Flamand. Vous habillez vos manques de plusieurs couches de vêtements, mais, sous tout ce fatras, il n’y a que vous, votre être pur. En me suivant, c’est vos déguisements de mère, de femme, d’amante, que vous avez entrepris de déchirer. Vous cherchiez à vous débarrasser de vos souffrances, de vos conditionnements, vous aspiriez à retrouver votre être pur, il vous fallait un prétexte, un mouvement. Je suis entré dans votre vie parce que vous m’avez appelé. Ou plutôt que nous nous sommes appelés. »
Jemma soupira.
« Votre discours me rappelle les trucs que j’ai lus sur un type qu’on appelait le Christ de l’Aubrac.
— Vaï Ka’i ? On a dit tout et son contraire à son propos. Que son enseignement était un avatar risible du New Age, qu’il reprenait les vieilles lunes hippies, qu’il exhumait les antiques superstitions des peuples premiers, qu’il n’y avait aucun fondement scientifique ou simplement raisonnable dans sa démarche… Je crois qu’on l’a éliminé parce qu’en renvoyant chaque homme et chaque femme à sa liberté intérieure, à son nomadisme, il abolissait le temps linéaire, la peur, et donc la structure même de la société. Les gens de pouvoir et de savoir ont toujours intérêt à vous tenir éloigné de vous-même, à vous identifier aux structures, à vous maintenir dans les jugements, à vous boucler dans des prisons, psychologiques ou réelles. »
Les rafales de vent hachaient le ronronnement du moteur et la voix de Luc. Le bateau traçait derrière lui une blessure livide aussitôt cicatrisée par la mer.
« Je ne vois pas le rapport avec la disparition des enfants. Ni le rapport avec le Moyen-Orient…
— Nous avons toujours considéré que les enfants avaient été enlevés. Parce que nous sommes incapables d’imaginer qu’ils se sont séparés volontairement de nous. »
Les propos de Luc révoltèrent une nouvelle fois Jemma ; son indignation se volatilisa dans la sérénité de la nuit.
« Je vous répète que Manon n’aurait jamais eu le courage, ni même l’idée, de quitter la maison.
— On dit que les animaux ont un sixième sens qui leur permet de pressentir les catastrophes imminentes. Les éléphants, par exemple, se réfugient sur les hauteurs quelques heures avant un raz-de-marée ou une inondation.
— Vous ne pouvez pas comparer des enfants avec des… Hé, minute ! Vous ne voulez pas dire que… »
Jemma se tut, effrayée par les mots qu’elle s’apprêtait à prononcer.
« Que la disparition des enfants annonce un bouleversement radical, poursuivit Luc. La fin d’un âge. Peut-être la disparition pure et simple de notre monde. »